Même les comités sociaux et économiques ne sont pas à l'abri des tentatives de fraude.

Certains salariés tirent parti des systèmes de prestations CSE en fournissant des justificatifs incorrects ou falsifiés, cherchant ainsi à obtenir plus que ce qui leur est dû.

Face à ces pratiques, comment le CSE peut-il se protéger et réagir efficacement ?

Cet article explore les méthodes pour reconnaître et éviter les fraudes aux justificatifs ASC.

Un membre du CSE qui télétravaille régulièrement acquiert ce droit

 

En février 2024, la cour d'appel de Toulouse a condamné un comité en raison du licenciement de l’assistante CSE : le CSE l'a licenciée, car elle a refusé de renoncer au télétravail.

 

Contexte et déroulement

Le télétravail de l’assistante CSE avait déjà été “instauré” avec l'ancien comité d'entreprise.

Dès son arrivée dans l’entreprise, l’assistante s’installe en télétravail.

Cependant, aucune mention explicite dans son contrat de travail ne précisait que l’assistante en question pouvait exercer ses missions à distance. Aussi, le télétravail n’a pas été mis en place dans l’entreprise par accord collectif, ni dans une charte unilatérale de l'employeur.

Lors du passage du CE au CSE, le CSE réclame à l’assistante le respect de son contrat de travail ; c’est-à-dire arrêter le télétravail et effectuer ses missions dans les locaux de l’entreprise. Le CSE lui propose même un aménagement d'horaire. Mais l'assistante refuse.

 

C’est suite à ce refus de la part de l’assistante, que le comité prend la décision de la licencier. Les motifs invoqués ? Non-respect de ses obligations contractuelles et raisons personnelles.

 

Réactions et recours de la salariée 

L'assistante licenciée a saisi le conseil des prud'hommes. Pour étayer sa demande, la salariée a présenté plusieurs éléments aux juges :

  • une déclaration d'un représentant syndical datant d'une réunion du CE de 2019, indiquant que le télétravail faisait partie de l'organisation prévue.
  • une attestation de la précédente assistante du CE, qui effectuait ses missions exclusivement en télétravail.

 

Bon à savoir

Face au rejet de sa première demande, la salariée licenciée a fait appel et a réclamé 17 000 € de dommages et intérêts au CSE pour “licenciement sans cause réelle et sérieuse dans des conditions vexatoires. Ce montant inclut également le paiement de son treizième mois et des chèques-vacances qui ne lui ont pas été versés.

 

La salariée licenciée affirme aux juges que le fait d'exercer ses fonctions en télétravail a été décidé dès son embauche. Elle affirme que le télétravail n’affecte pas l'organisation et le déroulement de ses missions - alors même que le CSE soutient que son télétravail a nui au bon fonctionnement de l’instance.

Elle explique qu’il a été convenu que sa seule venue en présentielle au siège du CSE soit conditionnée à une fois par mois et que la date de sa venue soit planifiée en accord avec la direction.

 

 




Quelles sanctions possibles pour les salariés concernés ?

Il n’existe pas de sanction possible de la part du CSE envers les salariés coupables de fraude aux ASC. Effectivement, la loi ne conçoit pas la relation entre le CSE et les salariés comme une relation hiérarchique.

Il est donc important que toute mesure disciplinaire prise par le CSE en cas de fraude soit incluse dans le règlement intérieur du CSE et adoptée en réunion plénière.

 

Bon à savoir

Face à un justificatif falsifié ou non probant, les membres du CSE sont face à une condition de versement qui n’est pas remplie : ils peuvent donc refuser de verser les prestations en question au salarié concerné.

 

En cas de fraude avérée, le comité peut exiger le remboursement des sommes indûment versées.

Confrontés à un salarié qui  refuse de procéder au remboursement du montant de sa fraude, certains CSE font le choix de prélever le montant dû par le salarié fraudeur du versement de ses futures ASC.

Attention toutefois, face à une telle procédure, le salarié fraudeur peut saisir le CSE en justice (bien que la faiblesse du montant en jeu puisse dissuader le salarié en question de contester en justice).

 

Face à une fraude au justificatif, la principale solution qui s’offre au CSE est donc de priver le fraudeur de l’activité sans le privé d’ASC. Le CSE peut ainsi suspendre les droits du fraudeur uniquement pour l’activité concernée par la fraude.

 

Bon à savoir

Toute mesure de rétorsion envers un salarié coupable de fraude doit être limitée au maximum. Elle doit évidemment être non discriminatoire et conforme aux procédures établies. 


Les moyens d'éviter les fraudes aux justificatifs ASC

 

Prévenir la fraude est tout aussi important que la détecter. Plus encore, la prévention est un gain de temps et d’énergie pour les élus. Quels mécanismes le CSE peut-il mettre en place pour dissuader les salariés de tricher ?

 

Établir clairement les critères d'éligibilité aux prestations CSE

Pour minimiser le risque de fraudes aux ASC, le CSE doit établir des règles claires et opposables aux salariés concernant l'octroi des prestations.

 

Ces règles précisent le type de justificatifs requis et les conditions de délai pour leur remise.

 

Par exemple, la subvention pour une activité doit être conditionnée par la présentation d’une facture valide, et toute demande doit être faite dans un délai précis pour éviter des réclamations tardives.

 

Voici des exemples précis de justificatifs pouvant être demandés par le CSE pour bien cadrer les conditions d’accès aux prestations :

  • justificatifs nominatifs pour chaque remboursement total ou partiel de l’activité (cinéma, spectacle, théâtre, salle de sport)
  • certificats délivrés par la mairie en cas de mariage ou de PACS
  • fiches de paie pour les modulations liées aux rémunérations des salariés

 

Bon à savoir

Le CSE doit lister de manière exhaustive et archiver les justificatifs requis afin de pouvoir les fournir en cas de vérification par l’URSSAF.

 




Instaurer des procédures de contrôle pour éviter les fraudes

Il est essentiel de mettre en place des procédures de vérification pour authentifier les justificatifs fournis.

Des contrôles élémentaires tels que le fait de s’assurer de l'existence d'une association ou de la validité d'une facture peuvent prévenir les fraudes.

 

Bon à savoir

Coordonnées de l’émetteur de la facture, date de la facture, et numéro de SIRET de l’entreprise ayant émis la facture font partie des éléments de base à vérifier pour effectuer un premier contrôle de validité d’une facture.

Les membres du CSE peuvent par exemple vérifier sur internet que l’adresse indiquée sur la facture fournie correspond bien à l’adresse réelle : une salle de sport existe bel et bien à l’adresse qui apparaît sur la facture fournie par le salarié.

En cas de doute sérieux, le CSE est en droit de refuser la prestation.

 

Aussi, le fait de mentionner dans le règlement intérieur que des vérifications seront systématiquement effectuées permet d’instaurer un climat de dissuasion contre la fraude.

 

À retenir

Face à la fraude aux justificatifs relatifs aux ASC, la prévention et la détection sont essentielles pour protéger l'intégrité financière et assurer l'équité entre les salariés.

Il est plus efficace pour le CSE d'investir dans la prévention des fraudes aux justificatifs plutôt que de se concentrer sur les sanctions après coup. Cela permet non seulement de préserver l'équité, mais aussi de simplifier les procédures et de minimiser les risques pour l'ensemble des parties impliquées.

La mise en place de procédures de vérification rigoureuses et de règles claires d'éligibilité sont le meilleur moyen de dissuader toute tentative de fraude.

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